dire encore au revoir aux Crawley

Je n’ai bien sûr pas pu résister à aller voir le troisième, et parait-il dernier, film de la saga Downton Abbey. Comme les deux premiers films, ce n’est pas un objet cinématographique très intéressant ou novateur en soi: c’est grosso modo une saison de Downton Abbey rentrée au chausse-pied dans un film de deux heures, avec toujours la même galerie de personnages downstairs / upstairs, les nobles et la domesticité, et les mêmes intrigues “first world problems” du genre est-ce qu’on va réussir le dîner qu’on a préparé pour l’Ambassadeur de Pétaouchnok ou est-ce qu’on va réussir à cacher la grossesse hors-mariage de Machine. Dans ce troisième film, après six saisons de la série télévisée de ITV et deux films qui répétaient déjà tous plus ou moins la même formule, on retrouve donc des intrigues à la limite de la redite par rapport à des histoires vécues par, parfois, littéralement les mêmes personnages dans des saisons précédentes : unetelle a peur de devoir coucher avec son mari maintenant qu’ils sont enfin mariés et qu’ils n’ont jamais baisé jusqu’à présent, untel viole le protocole social en se pointant comme invité à l’étage des nobles alors que les conventions voudrait qu’il reste avec les domestiques, unetelle couche hors mariage et court à sa perte sociale si cela se sait, untel est en conflit ouvert avec la maisonnée Crawley quant à l’organisation de la foire locale… Franchement on a déjà vu tous ces trucs. Mais c’est aussi ça, Downton Abbey, une formule délicieusement répétitive et prévisible, mais avec toujours ces ingrédients qu’on adore, ces one liners bitchy, ces costumes d’époque, ces décors de château et ces intrigues désuètes à base de protocole et de hiérarchies sociales de plus en plus poreuses. C’est comme se plonger dans un bain chaud ou se commander son plat préféré un soir où on a la flemme de cuisiner. Ce troisième film ne révolutionne rien, mais il continue tranquillement à tracer le sillon de l’évolution du tissu social monarchique britannique au XXème siècle et à explorer les dynamiques entre maîtres et domestiques, l’obsession de Julian Fellowes depuis son premier scénario, Gosford Park (un de mes films préférés) en 2001. Et même si je ne suis pas si sûr que ce soit une vraie fin (après tout, pourquoi la saga ne continuerait-elle pas à explorer l’évolution de la famille Crawley dans les années 30, 40 ou 50 dans les prochaines décennies ? Le seul vrai frein que je vois est que ces films coûtent vraisemblablement pas mal d’argent et n’en rapportent peut-être pas tant que cela, mais après tout on en est déjà au troisième, donc ils doivent s’y retrouver), j’avoue que la fin m’a ému, et que l’hommage à Maggie Smith, bien qu’attendu, m’a fait le petit pincement au coeur que les producteurs devaient espérer. Mais ils pourraient aussi tout aussi bien s’arrêter là et ne plus faire de suites, tellement ils ont bien laissé tout le monde sur un happy ending bien confortable et conservateur (tout le monde est désormais en couple et marié, là-dedans, y compris chaque domestique qu’on a bien rangé par paire au fil des films), et on serait juste content de savoir que tous ces personnages ont bien atterri là où ils devaient se retrouver en fin de compte. Mais s’ils refont un quatrième film dans deux ou trois ans pour montrer comment la famille Crawley traverse les années 1930, la montée des fascismes et la marche vers la Seconde Guerre Mondiale, je ne serais pas si surpris que ça. 

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