not everything is supposed to make you comfortable

Le film After the hunt avait une hype de fou des mois avant sa sortie. C’est qu’il y avait des arguments pour les fans de la “awards season” comme moi : le réalisateur Luca Guadagnino, qui flirte tranquillement avec les oscars depuis quelques années (Call Me by Your Name, Challengers) et qui sortait d’un double camouflet aux oscars 2025 (ses deux films de 2024, Challengers et Queer, ayant été snobés), un sujet post #MeToo, une prestation “comeback” de Julia Roberts dont il se murmurait à l’époque que c’était l’une des meilleures de sa carrière… Bref on était partis pour que le film soit l’un des prétendants aux oscars 2026, juste sur la base du clout. Et puis les premières projections en festival ont eu lieu, les critiques ont été bof, et le film a fini par sortir début octobre avec zéro hype, au point de devenir l’un des pétards mouillés de la saison, ne perçant même pas le top 5 du box office hebdomadaire. Julia Roberts, qui livre une bonne performance, n’est même pas dans le top 10 des prédictions des bookmakers pour les nominations à l’oscar de la meilleure actrice cette année (on sait déjà, plus ou moins, que le trophée va se jouer entre Renate Reinsve et Jessie Buckley, mais il y a toujours les trois autres spots “c’est déjà bien d’être nommée”), alors qu’avant l’été tout le monde pensait qu’elle serait le comeback incontournable de l’hiver aux Golden Globes et partout ailleurs.
Mais alors, c’est quoi le problème avec After the hunt? Il n’y en a pas vraiment. C’est un scénario très classique : un he said / she said, sur une affaire d’agression sexuelle dans le milieu privilegiù et feutre des universites de la Ivy League, où on passe le film à se demander si l’agression a vraiment eu lieu, dans un climat tendu entre les protagonistes de l’affaire et le personnage principal qui “enquête” sur le sujet. Le film se présente comme un thriller psychologique, et il y a toute une sous-intrigue sur le passé de l’héroïne et sur une addiction aux antidouleurs. En fait, j’ai l’impression d’avoir déjà lu ce pitch environ 20 fois, il a déjà été traité dans des films ou des series tele avant. La variante ici, c’est le personnage joué par Julia Roberts, Alma Imhoff, une universitaire d’origine allemande prise entre deux feux dans cette histoire, entre son ami et l’étudiante qu’elle a mentorée. Les spectateurs dfu film se plaignent qu’il est mou, qu’il y a beaucoup de moments de flottement, et que globalement ça manque de punch et de moments forts qui font avancer l’intrigue et l’enquête. Je crois que c’est un parti pris volontaire de Guadagnino, même s’il y a des maladresses (la typo très “film de Woody Allen” pour les titres et le générique est un choix pour le moins curieux, en 2025, pour un film sur ce thème), mais c’est probablement un reflet de la réalité de ces situations, malheureusement, quand elles se présentent: la victime n’est jamais assez une “bonne victime” pour être crue par tout le monde sans que sa parole soit mise en doute, l’agresseur clame son innocence, l’institution ne sait pas trop comment réagir… Le film prend un malin plaisir à brouiller les cartes. La jeune victime semble avoir des raisons de mentir, et la dynamique de pouvoir n’est pas complètement en sa défaveur. L’agresseur est très énervé d’être accusé, au point qu’on finit par se demander s’il n’a pas des anger issues bien suspectes et s’il n’est pas simplement réfractaire à la contrariété. L’héroïne “enquêtrice” quant à elle semble avoir un rapport ambigu à l’affaire, de par son conflit de loyauté mais aussi par un conflit, présenté comme générationnel, sur ce qui serait ou non la bonne façon de réagir. Je pense que le film s’apprécie davantage en le voyant une deuxième fois, une fois qu’on comprend les tenants et aboutissants, les motivations du personnage principal et les réponses ou absences de réponses que le film apporte. On pourra alors davantage se consacrer aux indices et aux interactions des personnages, notamment dans la première partie du film, au regard de ce que l’on sait. Mais c’est vrai que le film n’a pas l’intensité ou le mordant qu’on attendrait, en 2025, sur un tel sujet.
L’autre point qui m’a chiffonné, c’est d’avoir casté Julia Roberts. Une partie de l’intrigue du film repose sur le fait qu’elle est allemande et qu’un événement de son passé n’a pas traversé l’Atlantique. Sauf que Julia Roberts n’a absolument rien d’européen, et même si elle joue très bien la meuf froide, intello et distante, j’ai passé le film à me dire que Jodie Foster ou Tilda Swinton aurait insufflé une énergie et une “vibe” européenne plus forte au rôle d’Alma, avant de me rendre à l’évidence : en fait c’était un rôle pour Cate Blanchett, mais le rôle d’Alma Imhoff ressemble tellement à celui de Lydia Tár que la redite (et les comparaisons) auraient été trop évidentes, et probablement en défaveur d’After the hunt, car le personnage de Lydia Tár avait une personnalité, des motivations et une absence de compas moral qui la rendaient beaucoup plus intéressante et maîtresse de l’histoire.

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