Le côté frais de l’oreiller

 

Quitte à ne rien dire, autant parler météo. L’un des trucs les plus pénibles, avec ces périodes de forte chaleur, c’est quand ça se prolonge la nuit. 29°C à deux heures du matin, c’est pas possible, pour nous les blancs européens pas encore habitués à ces ambiances quasi-tropicales qui pourtant, désormais, semblent devoir définir nos étés. J’ai mis deux bonnes heures à m’endormir cette nuit, notamment à chercher la position dans laquelle mon corps ne semblait pas entrer en ébullition spontanée. Mais aussi à me relever pour boire un verre d’eau, afin de réguler ma température. Ou à chercher un spray d’eau froide pour m’asperger le torse et le visage, dans le noir, lorsque je sentais que j’avais trop chaud. Rien ne semblait fonctionner plus de dix minutes d’affilée.

 

La fenêtre ouverte non plus, ça ne fonctionne pas. J’ai alterné plusieurs fois dans la nuit entre la fenêtre ouverte pour ne pas ressentir l’atmosphère étouffante de la chambre et espérer glaner un minuscule courant d’air, et la fenêtre fermée lorsque j’avais la sensation, peut-être paranoïaque, passée une certaine heure, que l’air était en fait plus chaud dehors que dedans. Les tweets, les chroniques radios et les articles en ligne rivalisent d’idées pour tenter de nous faire contourner la chaleur, sans oser prononcer le mot climatisation, et je ne sais pas encore lesquelles je vais essayer : le drap mouillé à l’eau froide en guise de rideau sur une fenêtre entrouverte la nuit, le ventilateur avec un linge humide dessus, les pains de glace dans les draps, les douches tièdes à minuit…

 

Mais s’il y a bien un truc que je fais tout le temps lorsque les températures montent et que je commence à me sentir chaud, voire moite, au niveau du crâne, c’est ce réflexe quasiment inconscient, involontaire, qui consiste à retourner mon oreiller pour poser la tête sur le côté « frais », celui qui était en-dessous et ne touchait pas ma peau : maigre soulagement, qui ne dure hélas que quelques instants, avant que la chaleur générale ne semble à nouveau faire bouillir ma peau. Pourtant, quelques minutes plus tard, je vais refaire le même geste, retourner l’oreiller, ma tête cherchant un coin de tissu molletonné mais frais, jusqu’à ce que je sombre dans une espèce de demi-sommeil qui me tiendra, avec un peu de chance, jusqu’à sept heures du matin.

 

Et le paradoxe qui me turlupine le plus dans tout ça : je n’arrive pas à complètement renoncer à être couvert par un drap. Au moins la taille et le ventre, ai-je remarqué. Ce qui ne correspond hélas à aucun vêtement existant. C’est donc nu avec un coin de drap posé en mode pagne sur le bas ventre que je tente, péniblement, de m’endormir en gérant les températures actuelles. Avec un coin frais d’oreiller. Je ne sais pas si ça va suffire pour tenir tout l’été : je suis épuisé. Parfois je me demande si ceux dont l’été est la saison préférée l’adorent en souvenir des grandes vacances de leur enfance, en se souvenant d’étés moins caniculaires, ou s’ils kiffent simplement cette fournaise, sans rire, au premier degré. Vivement la plage pour bénéficier d’un peu d’air, et pour au moins avoir l’impression de cramer pour quelque chose.

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