lashing out

Je n’ai pas d’autre ami comme Rod. Le fait qu’il soit un ex participe peut-être à cette forme de complicité et de facilité naturelle à tout lui raconter, sans rien cacher mais sans non plus se sentir impudique ou jugé. Je ne suis le meilleur ami de personne, dans la vie. Même pas le sien. C’est comme ça. Je suis le genre de personne que tout le monde aime bien, mais personne ne ressent de lien si spécial et si étroit avec moi qu’il ou elle m’appelle son meilleur ami. Mais Rod est le mien. C’est la personne à qui je peux parler de mes parents, de mes plans cul, de mes histoires de coeur, de mes frustrations, de mes problèmes personnels ou professionnels, et je sais qu’il ne sera jamais choqué et qu’il ne va pas être mal à l’aise face à ce que je raconte. J’adore mes potes de fac, ce sont mes amis depuis plus de vingt ans, mais si je leur racontais en détail mes histoires de backrooms, de dating, de fric ou de cynisme, je ne sais pas s’ils sauraient le digérer. Mais Rod a accès à la version “unfiltered”, parce que je sais qu’il comprend, et que rien ne peut le choquer ou le mettre mal à l’aise, que ce soit les trucs outranciers, les tristesses ou les amertumes. Je ne l’emmerde pas tous les jours avec mes histoires, bien sûr. On doit se parler une fois tous les quinze jours, et on s’envoie des conneries en DM sur Instagram entretemps. Et heureusement, on ne se parle pas que de trucs pénibles, il n’est pas un simple déversoir à aigreurs. Mais ces derniers mois, il a été, comme toujours, un ami exemplaire, à qui je peux montrer les côtés les plus moches de ma personnalité, mes névroses et ma négativité qui tournent en boucle par moments, lorsque je ne sais pas trop comment me sortir d’une situation, ou simplement l’accepter. Cette semaine, je l’ai eu au téléphone pendant quarante minutes, pendant une pause dej, et le pauvre, je crois que je l’ai inondé de pensées négatives sur mes frustrations du moment, mais il est resté constant dans sa posture de soutien, de conseils et de positivité, tout en étant ouvert à ma négativité et à ma vision des choses. C’est épuisant, parfois, quand on est là à se plaindre et à ronchonner, de se retrouver à débattre avec quelqu’un qui se contente de vous servir des solutions sur un plateau à base de “bah t’as qu’à faire ca”. Rod comprend que ce n’est pas forcément ce qu’on a besoin ou envie d’entendre. Évidemment qu’à la fin, je vais faire ce qu’il faut pour m’en sortir, ou que je vais continuer à faire l’effort que je fais déjà jusqu’à ce que ce soit payant, ou que je vais accepter la situation telle qu’elle est au lieu de m’en plaindre s’il n’y a rien à faire pour l’améliorer. Mais en attendant, la frustration a besoin de s’exprimer, et c’est cool d’avoir quelqu’un, dans ma vie, qui me “voit” traverser les moments sombres, qui m’écoute et me regarde tourner en rond sans me juger, et qui sait qu’en fin de compte je vais m’en sortir. J’espère que je suis aussi cette personne pour d’autres de mes amis. Ex ou pas. J’espère qu’ils savent que je les aime et que c’est difficile de me choquer, de me mettre mal à l’aise, et encore plus difficile de me faire “démissionner” d’une amitié après des années juste parce que, parfois, ils ont des choses pas très glorieuses ou un peu bizarres sur le coeur.

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